6 novembre 2020. Temps clair au réveil.
D'abord profiter de l'instant : ouvrir la fenêtre, se remplir d'un air plus frais, à nouveau moins lourd de particules depuis qu'on est retourné au télétravail ou au chômage, se remplir du presque silence inhabituel et de la lumière jaune du soleil, jaune et appétissante comme un oeuf sur le plat.
Justement, petit déjeuner tranquille : ne rien brusquer, gestes lents et ronds, explorer chaque bouchée de la dent, de la langue et du palais, bien sentir le chaud, le salé, le sucré, l'onctueux, le croustillant... Aaah ! (bon soupir de satisfaction)
Laisser maintenant voleter l'esprit autour des petits rêves de bonheur qui pourraient emplir cette belle journée d'automne : un verre de blanc pris en terrasse avec un copain, une virée lèche-vitrine avec une copine, un restau sans chichis comme en amoureux, un cinoche, le dernier livre de François Bégaudeau... A cet instant précis, vous y croyez tout de même parce que vous n'imaginez pas comment des jours meilleurs ne pourraient pas advenir après toutes ces catastrophes successives.
Patatras ! L'autre qui vit avec vous vient d'allumer la radio.
Aussitôt se déverse, en un torrent confus et ininterrompu, le vacarme quotidien du monde qui emporte votre quiétude définitivement.
La publicité d'abord. Bon, ça ne vous étonne pas parce que vous avez depuis longtemps constaté qu'en zappant vous tombez une fois sur deux sur de la pub. Vous voudriez protester mais après la pub viendront les infos. "Chut tais-toi, écoute !" dit l'autre qui vit avec vous. "Se tenir au courant, c'est important."
Mais ce matin, rien de nouveau : les hôpitaux toujours à la recherche des lits perdus, les islamistes toujours à fomenter des attentats à la petite cuillère contre nos valeurs et la démocratie américaine toujours constipée. Comment tout cela va-t-il (ne jamais) finir ? Nous vivons dans un suspense permanent.
Même quand il ne se passe strictement rien, c'est-à-dire quand des événements très importants se produisent et que nous ne devons pas connaître, comme par exemple la signature d'un traité de libre-échange qui va ruiner nos paysans, les médias nous inventent des trucs fous, rien que pour faire le buzz, nous amuser et nous servir notre pâtée d'infos quotidienne.
Ce n'est pas du tout innocent, d'abord du point de vue de la propagande, mais aussi parce que chaque lecteur, auditeur ou spectateur supplémentaire fait grimper le prix que les annonceurs paient pour passer leurs pubs.
C'est donc juste pour faire du fric. Les événements traités comme de simples marchandises, il est normal que les infos qui ont mauvais goût soient écartées ou, si incontournables, tour à tour édulcorées ou salées, mais toujours emballées dans le jus censé être au goût d'un public supposé faible d'esprit et formaté de cette façon à longueur d'émissions, de journées, de mois et d'années.
Au point que certains médias ne font plus que de l'info pseudo sensationnelle, qui rebondit de twit en twit ou bien s'étire à la manière d'une série, genre comédie dramatique à la "Plus belle la vie". On en deviendrait presque accro, pas vrai ?
Bon, vous voilà à présent les deux pieds dans le triste réel. Alors pour échapper à la nausée, vous dites à l'autre qui vit avec vous "Allons faire un tour, poussin.
- Chic ! Au grand magasin ?
- Ah ben non, poussin, à pied."
Au moins là, vous prenez l'air.
Et puis vous tombez bientôt - pas de bol - sur une vague connaissance qui vous parle aussitôt des élections américaines : "Faut absolument que Trump gagne. Vous savez qu'il a démantelé un réseau de pédophiles dont faisaient partie Biden et Clinton ? Oui ! Ils allaient chercher des enfants au Mexique pour les violer, et même faire des messes noires... C'est pour ça que Trump a construit le mur."
... ?
Pff ! Au point où on en est, est-ce qu'on pourrait tomber plus bas encore ?
Richard
(à suivre)
Visitez les USA
https://www.youtube.com/watch?v=3IjdsWKTePw
https://www.youtube.com/watch?v=3ulZWuwiouw
https://www.youtube.com/watch?v=zaeQ4VaT5qw
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