samedi 29 juillet 2017

La comédie du pouvoir - 15. Pour se faire élire : rester dans le vague.

« Les mêmes chances pour tous nos enfants. » C’était une des promesses de Macron. 
Déjà, ça commence par un wagon de sous-entendus. Comme toujours avec EM, des choses sont suggérées et le reste n’est pas dit.
1. Ainsi, il n’est pas écrit que lui et ses potes vont donner ces chances-là. Admettons donc que cela aille de soi.
2. Ca fait allusion à certains enfants qui n’auraient pas les mêmes chances que d’autres, sous-entendu ceux auxquels chacun de vous pense. Ah mais ça, l’égalité (« notre société est injuste ! »), c’était le grand leitmotiv du programme Macron. Justement parce qu’il n’est pas du tout pour l’égalité.
3. Par « mêmes chances », il fallait en réalité comprendre qu’une fois qu’on vous aurait mis sur une certaine même ligne de départ que les autres, il vous faudrait quand même vous défoncer pour « réussir » sans quoi vous ne seriez « rien ». Mais il ne dit pas du tout où se situe cette ligne de départ propre à équilibrer les chances. Bon, bien sûr, c’est ce que les points de programme qui suivaient ce titre étaient censés définir.

Et là, on voit tout de suite que l’Education Nationale, et elle seule, est à la fois le problème et la solution en matière d’égalité des chances. Non, on ne cherchera pas plus loin, car cela obligerait à remettre en cause trop de vraies inégalités. Et cela, bien sûr, on ne le veut pas. Et Macron de décliner sa belle formule en quelques points vite torchés, soit totalement anecdotiques et populistes, soit d’un flou sidéral (et sidérant) destiné à masquer leur grand vide en même temps que l’arrière-pensée qu’on pourra, quand l’élection sera gagnée, combler ce grand vide avec à peu près tout ce qu’on voudra. Et tant pis pour ceux qui auront mal décrypté le message, mal sous-entendu, et... voté pour lui.

1 - … priorité à l’école primaire pour que tous les élèves sachent lire, écrire et compter en arrivant en 6e.
˃ Sous-entendu : les élèves ne savent pas lire, écrire, etcetera, parce que l’école ne fait pas son boulot.
Sans dire sur quoi portera la priorité, ni quelles actions seront mises en place, ce ne sont que paroles en l’air.
Flou !

2 - Nous interdirons l’usage des téléphones portables dans l’enceinte des écoles primaires et des collèges.
˃ Sous-entendu : les Conseils d’Ecole et les C.A. des collèges auraient déjà dû le faire.
Leur ôter le portable ne va pas obliger les élèves à aimer l’école. Du temps qu’on n’avait pas de portable, on jouait au morpion.
Anecdotique !

3 - Nous donnerons plus d’autonomie aux équipes éducatives.
˃ Sous-entendu : elles n’ont pas assez d’autonomie pour bien travailler. Et voyez donc comme je suis libéral avec les enseignants.
Quel genre d’autonomie, dans quels domaines ?
Flou !
- Elles seront suivies et évaluées.
˃ Sous-entendu : elles ne sont ni suivies, ni évaluées. C’est pour ça qu’elles travaillent mal.
On comprend donc que les équipes éducatives ont au contraire trop d’autonomie et qu’il faut donc les contrôler. Mais ça ne dit pas ce qui sera évalué, ni comment les équipes seront sanctionnées et éventuellement récompensées (sinon quelle raison d’évaluer ?).
Flou !
- La formation des enseignants sera adaptée à ce nouveau cadre.
˃ Sous-entendu : le cadre est vieux. A moderniser !
S’agit-il d’apprendre aux enseignants à être autonomes, suivis et évalués ? En tout cas, ça annonce une énième réforme de la formation. Avec augmentation de salaire ?
Flou et peut-être faussement anecdotique !

4 - Nous limiterons à 12 élèves par enseignant la taille des 12 000 classes de CP et de CE1 en zone prioritaire.
˃ Sous-entendu : voilà pour les milieux défavorisés.
Ce charabia masquait sans doute le fait que 12 élèves par enseignant, en REP, feront toujours plus que 12 élèves par classe puisqu’ils y sont plus d’enseignants que de classes. Mais bon, personne ne pouvait être contre puisque les profs n’arrêtent pas de réclamer moins d’élèves. 
Populiste !
Et pourtant, on entend déjà que ça va coûter un bras et qu’on va déshabiller Pierre pour habiller Paul. Pour l’instant, pas de réponse du gouvernement. Un truc auquel ils ont dû penser : réduire le nombre des « zones prioritaires ».
- Ces enseignants recevront une prime annuelle de 3000 euros nets. Et … d’ici 2022, … auront au moins 3 ans d’ancienneté.
˃ Sous-entendu : voilà pour les enseignants. (ça fait un moment déjà que, de tous bords, on leur passe systématiquement la brosse à reluire). 
Treizième et quatorzième mois pour les plus jeunes. Avec ça, ils seront sûrement meilleurs. L’ancienneté, c’est pour amadouer les parents.
Populiste et anecdotique !

5 - Nous rendrons possible le rétablissement de parcours bi-langues au collège, de parcours européens et d’un véritable enseignement du grec et du latin.
˃ Sous-entendu : voilà pour les classes moyennes et les petits bourgeois (c’est un scandale que vous ne puissiez choisir le cursus de votre enfant : je libéralise) et pour les enseignants (ouf ! des postes sont sauvés).
La plupart des petits Français étant déjà incapables d’apprendre correctement une seule langue étrangère, ça ne va pas toucher grand monde.
Anecdotique !

6 - Nous proposerons à tous un accompagnement après la classe.
˃ Sous-entendu : le système actuel est inégalitaire, injuste, puisqu’il favorise les plus défavorisés ainsi que les élèves en difficulté qui seuls ont droit à ce dispositif.
Alors comme ça, des devoirs pour tous ? Gratuits ? Ca va faire garderie, dites donc. Et qui va donner les cours ? Les profs ? Et qui va les payer ? Pas les communes qui reviennent aux quatre jours justement pour ne pas avoir à financer du périscolaire. Avouez que vous n’avez pas réfléchi à ça, monsieur En Marche, hein... Oui, je sais, c’est en vertu du principe d’égalité : ce ne serait pas juste en effet que les pauvres aient quelque chose que les riches n’ont pas.
Flou, anecdotique et populiste !
- Au collège, nous rétablirons les études dirigées après la classe grâce à des bénévoles (étudiants et retraités).
Ah ben voilà : des bénévoles ! Sans rire, vous avez demandé aux étudiants et aux retraités s’ils sont d’accord ? Non ? Alors, paroles en l’air.
- Nous moderniserons le baccalauréat. … 4 matières obligatoires à l’examen …. Les autres … contrôle continu.
Holà, président ! On a compris : quand vous dites moderniser, ça cache toujours une entourloupe. A tous les coups une sélection plus drastique à l’entrée en fac, avec suppression du choix de la filière… Hein ? C’est ça ? Mais oui, je vous connais bien. Sournois, va !

7 - Nous renforcerons l’autonomie des universités. Elles pourront recruter leurs enseignants et définir leurs formations.
Est-ce que ce n’est pas déjà comme ça ?
- Nous ouvrirons 80 000 places dans les filières professionnalisantes.
Vous ou les universités plus autonomes ?
Enfin, ça sent fort la recherche de rentabilité. Va falloir songer à supprimer l’histoire et la philo et laisser le MEDEF mettre un pied dans la maison.

8 - Nous demanderons à chaque lycée professionnel et université de publier ses résultats (débouchés, salaires, etc.) sur les 3 dernières années.
˃ Sous-entendu : les enseignants se la coulent trop douce, c’est pourquoi ils n’ont pas de résultats. (ça fait un moment déjà que, de tous bords, on leur casse systématiquement du sucre sur le dos)
Va falloir qu’ils se décarcassent maintenant et qu’ils s’adaptent au marché. Il n’y a qu’à demander aux patrons de quoi ils ont besoin. Ah, mais oui, ça se fait déjà, par l’ANPE et par les boîtes d’intérim. Non ?
Populiste et anecdotique !

9 - Nous construirons 80 000 logements pour les jeunes.
Très bien mais c’est qui, nous ? Avec quels sous ? Et quand ?
Flou !

10 - Nous ouvrirons les bibliothèques en soirée et le week-end.
Vous avez demandé aux bibliothécaires ? Non ? Alors il faudra en embaucher… ou fermer en semaine. Mais il y avait une bien meilleure chose à faire pour la culture de nos petits : obliger les télés à arrêter de diffuser des conneries à longueur de journée. J'ai appris par un copain que le QI des Français avait baissé - putain ! - et que les experts se grattaient le cuir chevelu pour y trouver une explication - re -. Ben, moi, je sais : c'est la télé, je dirais même la TNT, ce truc que Sarkozy nous avait vendu comme si c'était le summum du progrès et du bonheur. 
Donc anecdotique !

11 - Nous créerons un « Pass Culture ». Il permettra à chaque Français de 18 ans d’effectuer 500 euros de dépenses culturelles (cinéma, théâtre, livres...).
Un cadeau électoral, quoi. Sans vergogne, financé par la baisse de 5 euros de l’aide au logement des étudiants pauvres ? Leclerc et Cultura attendent, pleins d’espoir, le décret d’application.
Populiste !

12 - Nous ne retirerons pas un euro au budget du ministère de la Culture.
˃ Sous-entendu : sans déconner, on pourrait le faire, parce que franchement la culture ça ne sert à rien d’autre qu’à fourrer des idées dans la tête des jeunes.
Un programme en négatif, ça c’est trop fort, monsieur EM. De toute façon, il n’est pas bien gros le budget de la culture. Mais si vous lui ajoutiez la prestation précédente, vous pourriez même vous vanter de l’avoir augmenté. Malin, non ? Ah, elle est déjà comptée dedans ? Du coup, en fait le budget baissera… Chapeau, l’illusionniste !

Voilà, on a fait le tour. C’était la boîte à malices, le programme En manuel Marche Macron. Il peut en sortir n’importe quoi, surtout le pire. Et dire qu’on a voté pour. C’est con, hein. Mais je suis beau joueur, je laisse le dernier mot à notre président :
« …Car la mission de notre République, c’est de remettre tous ses membres sur la même ligne de départ à chaque étape importante de leur vie. Bien sûr, il y en a toujours qui courront vite et d’autres qui trébucheront. Ou ne pourront tout simplement pas se lancer dans la course. Ou choisiront une trajectoire différente. Mais si l’on connaît à l’avance l’ordre d’arrivée, alors à quoi bon essayer de courir ? » (c'est du Jean-Claude Van Damme !)


Et tu crois qu’en laissant les gens galérer dans la pauvreté l’ordre d’arrivée va changer ?

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