vendredi 7 juillet 2017

La comédie du pouvoir - 8. La dramaturgie médiatique a rendu toute chose banale.

L’actualité politique me gonfle en ce moment : un an de campagne électorale, c’est long, ça lasse. Les politiciens, les patrons et les journalistes, eux ne sont pas fatigués de faire et dire des conneries. Dans l’indifférence générale. A force que soit théâtralisé le moindre événement, il devient en effet difficile de distinguer ce qui est important de ce qui est anecdotique.

D’abord, les obsèques de Simone Veil. Ca tombait bien, on n’avait rien à vendre ces temps-ci. Alors, comme à chaque fois qu’un policier meurt des coups des terroristes ou qu’un ancien ministre casse sa pipe, l’Elysée (c’est toujours l’Elysée) organise des festivités - grandes pompes bien compassées - où les écornifleurs en tous genres viennent sans vergogne se pavaner. Par la même occasion, le chef de l’état offre ainsi au bon peuple quelque héros à vénérer, choisi selon les contingences du moment, qu’on ressortira comme caution idéologique, également selon les circonstances. Aussi est-il normal que le Panthéon (étymologie : tous les dieux) soit rempli en majorité de militaires et de politiciens, la plupart oubliés. Ils sont là, bien peu d’humanistes, de penseurs : https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_personnes_inhum%C3%A9es_au_Panth%C3%A9on_de_Paris
Pas sûr que sainte Simone Veil apprécie la compagnie de ces grands hommes qui en outre se sont certainement retournés dans leur caveau en entendant parler de féminisme. « J’ai décidé […] que » Simone Veil irait dans le Panthéon, a dit le président. Il a dû penser que c’était bon pour son image.
Les cendres de Guy Môquet, sorti en son temps des oubliettes par Sarkozy pour la beauté du symbole et sa propre image, ont bien failli déménager au temple du Quartier Latin. Perso, je verrais bien Johnny panthéonisé ; de son vivant. Quand je songe à ce qu’est devenue la Légion d’Honneur, je ne vois vraiment pas où serait l’outrage. Ah ouais, il est belge.

Et puis, il y a Christian Jacob, l’inénarrable ! que j’entends le matin vilipender l’odieux traître Edouard Philippe et dont j’apprends que le soir il s’abstenait de voter la confiance au gouvernement, et une majorité de Les-Républicains avec lui. Quelle conviction dans les idées, quel courage politique, les gars ! Tout le monde voit bien maintenant la carotte Macron qui vous pend au-dessus du nez, et aussi que vous avez le froc (ou la jupe) sur les genoux et la langue crottée ; et vous nous la jouez droit dans les bottes, donneurs de leçons - et sérieux, avec ça ? Allons, allons, baissez la tête, de la dignité, que diable !
Un naïf croirait ce dilemme cornélien, mais il n’en est rien : ces gens-là ne sont que des opportunistes, soucieux de conserver leur mandat. Ils trahiront Macron dès que les effets de sa politique libérale lui feront perdre des points « dans le cœur des Français ». Leurs discours, leurs postures, l’indignation, le sens du devoir, le respect des valeurs républicaines, l’honnêteté, les vertus morales, ces grands sentiments qu’ils donnent à voir, tout n’est en effet que mise en scène à destination de l’électeur. En coulisses, on ne trouve que petitesse d’esprit, calculs et mesquineries. Evidemment, là, c’était à l’Assemblée : ils n’ont pas pu faire autrement que d’exposer leurs contradictions sur le devant de la scène. C’est pourquoi, si un journaliste leur avait posé la question, ils nous auraient expliqué que dire blanc et voter noir, c’est l’essence même de la démocratie.

Je termine avec cette journaliste de Radio France qui nous apprenait l’autre jour que des salariés français ayant bossé dans des pays du golfe pour des entreprises appartenant à Saad Ariri, premier ministre du Liban, n’avaient pas été payés depuis un an, qu’ils étaient en procès et qu’une filiale du groupe industriel concerné avait déjà fait savoir qu’elle ne paierait pas - point. Et cette grande professionnelle d’en conclure, le plus placidement du monde : « Oui, c’est une vraie question. » Pour un patron qui vole le travail de ses employés et qui s’assoit sur la loi et la justice, elle ne trouve pas d’autre mot ? Ou elle craint de les utiliser ?
Et le gouvernement, qu’est-ce qu’il fiche ? Bon sang ! Ah, il regarde ailleurs ? C’est secret ? On ne peut pas se fâcher avec le Liban ? Putain, on va regretter Sarkozy. Lui, il aurait agi, illico, envoyé Carla, Sylvie Vartan, comme dans l’affaire des infirmières bulgares chez son copain, ex-copain Kadhafi. Bon, avec ça, il a aussi foutu un bordel là-bas, que pour y échapper, il y en a encore tous les jours qui se jettent dans la Méditerranée.

Oui, bof, la guerre, la famine, les migrations, c’est d’un banal.


Richard

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