Un pote m’a envoyé ce qui suit, qui est tiré de là : http://www.francetvinfo.fr/sante/patient/droits-et-demarches/nouveaux-tarifs-pour-les-consultations-complexes-et-tres-complexes_2370697.html
CITATION. « Les tarifs […] publiés au Journal
officiel, le 12 septembre. Les consultations complexes facturées 46 euros concernent
par exemple les enfants de 3 à 12 ans avec un risque avéré d'obésité, les
nourrissons à la sortie de la maternité et les jeunes filles de 15 à 18 ans qui
souhaitent obtenir une contraception ou une consultation de prévention
contre les maladies sexuellement transmissibles. »
Tout est là : http://www.csmf.org/niveau-3-consultations-complexes
Ainsi donc, il existe des consultations complexes. Mais que
cache ce terme ? Evidemment la durée que le médecin consacre à son
patient. L’équation « Time is money » résume parfaitement l’affaire.
On comprend que 25 euros, c’est pour le rhume ou la flemme du lundi matin. Quasiment
tout le reste est plus cher, en raison, nous dit-on de sa complexité, sans
jamais parler de durée de la consultation, comme si on ne voulait pas mentir,
sachant déjà que la durée dans tous les cas est à peu près la même.
Connaissant la nature humaine, je prends en effet le pari
que le nombre des consultations complexes va bientôt exploser dans l’hexagone. Ben
oui, mettez-vous à la place du toubib : il vaut mieux qu’il diagnostique
un maximum de pathologies complexes dans le minimum de temps, s’il veut devenir
riche. Et à l’instar de « l’ouvrier fainéant qui profite du
système », il ne va certainement pas se gêner (dirait certainement notre
président). Comme vous, le patient, n’y connaissez rien, vous allez naturellement
vous laisser faire… et angoisser en prime.
CITATION. « Ces
consultations peuvent être assorties d'une majoration de 16 euros dans certains
cas comme la prise en charge d’un couple stérile, de l’asthme ou encore d’une
pathologie oculaire grave. »
En fait, plus on est malade, plus on souffre, et plus on
paie. C’est la double peine. Parfaitement injuste, non ?
Je pense que ça devrait être le contraire. Quelqu’un qui
vient embêter son docteur pour un rhume ou une flemme du lundi matin devrait payer 46 euros, remboursés sur 25. Ca
découragerait certainement des types comme j’en ai vu aux urgences avec une
petite rage de dent râler parce qu’on prenait en priorité un bébé malade arrivé
après lui.
Mais les toubibs verraient alors aussi leur patientèle commune
en bobologie diminuer, d’où manque à gagner, d’où tentation de diagnostiquer
davantage de cas complexes. Parce que ce qui amène le malade chez le docteur,
c’est la sécu au moins autant que la maladie. C’est la base sécu qui leur permet
de se voter des primes en pratiquant le dépassement d’honoraires (sans parler de certains dessous de
table). C’est la sécu qui, en les remboursant, permet qu’on se fasse prescrire
des laxatifs au lieu de manger des légumes. C’est la sécu qui garantit le
salaire des médecins. La sécu est une bonne vache à lait, une vraie poule aux
œufs d’or.
Et Macron s’apprête, en baissant les cotisations sociales, à
lui couper l’herbe sous le pied ! Ah la la ! C’est encore le corps
médical qui va en pâtir si les patients pauvres ne deviennent pas rapidement
assez riches pour se payer une consultation complexe.
CITATION. « Un
autre tarif fait également son apparition : la consultation dite ’’très
complexe’’ facturée 60 euros. Le Dr Jean-Paul Hamon […] explique : "Les
consultations très complexes sont des consultations heureusement rares qui
concernent la préparation de greffes rénales, pour les insuffisants rénaux. Il
faut annoncer à la personne donc c’est toujours très compliqué à faire. Il y a
les consultations d’annonce de cancer, c’est toujours délicat. Il y a également
des consultations pour les gynécologues pour les malformations fœtales. Ce sont
des consultations longues et pénibles à annoncer. Donc, c’est une liste de
consultations qui sont très complexes, très longues. La Sécurité sociale a
reconnu cette spécificité!". »
Assez pauvre et embrouillé dans ses arguments, le père Hamon ! 60 euros se
justifient selon lui par la pénibilité, c’est-à-dire la souffrance du docteur
qui est obligé de t’annoncer que tu vas mourir d’un cancer ou que ton gosse sera
handicapé ; si on le comprend bien, 60 euros rémunèrent aussi la
délicatesse qu’il met à te faire cette annonce.
Et apparaît enfin le critère de
la longueur de la consultation, sans toutefois qu’elle soit chiffrée ou
encadrée. Le praticien peut donc être tenté de la raccourcir, d’autant plus que
personne ne viendra vérifier s’il a vraiment pris le temps de mettre ses gants
avant de te foudroyer avec la mauvaise nouvelle.
Ah, excusez, on me dit que j’attige un peu, car il y a
quelqu’un qui peut vérifier : le directeur de ta caisse de maladie. Et en
effet, on trouve sur Internet ( http://www.leparisien.fr/societe/91-consultations-en-un-jour-un-medecin-suspendu-10-11-2012-2309181.php
) ce fait divers tout à fait exemplaire (je n'ai pas dit courant).
CITATION. « Un
véritable stakhanoviste de la médecine ! C'est à la suite de la plainte du
directeur de la Caisse primaire d'Eure-et-Loir qui estimait que les
consultations de ce médecin étaient trop importantes que le conseil régional de
l'ordre des médecins s'est intéressé au cas du docteur Michel Miramont. Ce
généraliste de Chartres vient d'être condamné à une interdiction d'exercer
d'une année. Le médecin était accusé d'avoir effectué 17.303 visites pour
l'année 2010 et 19.960 pour l'année suivante, alors que la moyenne des visites
de ses confrères est de 4.900. Et il n'en est pas à sa première incartade
devant la chambre de discipline du conseil de l'ordre. Il a par le passé déjà
été sanctionné à deux reprises, en 2000 et 2005. »
Le journal « Le Parisien » est un journal
rigolo : il appelle incartade ce qui est en fait une escroquerie. Bah, on
aurait tort de lui jeter la pierre puisque l’ordre des médecins lui-même n’a
infligé au « stakhanoviste » qu’une petite peine d’un an
d’interdiction d’exercer, alors qu’il était déjà bi-récidiviste. Quand on se
juge, comme les médecins, entre soi, il y a peu de chance que la justice soit
réelle, n’est-ce pas. Mais poursuivons notre lecture.
CITATION. « […]
les visites longues […] limitées à trois par an et par patient passent de 56
euros à 70 euros. Ces consultations concernent essentiellement les patients
atteints de la maladie d’Alzheimer ou de maladies neurodégénératives. […] les
remboursements ne changent pas. Ils sont toujours pris en charge à hauteur de
70%. »
Ah ben si, les tarifs changent : 70% de 56 euros, ça
laisse 16,80€ à la charge du patient, 70% de 70 euros, c’est 21 euros. Faut être précis.
Bon, on a compris que le problème qui fait grimper les prix, c’est la revendication
des médecins pour leur niveau de vie et que ce niveau de vie dépend directement
d’une part du prix de la consultation et d’autre part de sa durée.
N’aurait-on pu mettre en place un système simple,
proportionnel, un tarif à la seconde, par exemple ? Tant de secondes de
consultation égalent telle somme, un peu comme pour les taxis.
- Ah oui, mais non, parce que là, le patient aurait un moyen
de contrôler si son docteur lui a consacré le temps que nécessite vraiment sa
maladie, ni trop, ni trop peu, il pourrait comparer avec d’autres.
- Et ainsi les indélicats ne pourraient pas faire durer
abusivement. Pas mal !
- On peut même imaginer que le patient stoppe de son propre
chef la consultation.
- … ?
- Ben quoi, ce n’est pas parce qu’on n’est pas un
spécialiste qu’on doit arrêter de penser, qu’on doit abdiquer de son
libre-arbitre.
A propos, j’oubliais de vous donner la durée moyenne d’une
consultation en France : 17 minutes. Ca suppose qu’il y en a qui font
moins et d’autres plus, qu’il y a des diagnostics plus ou moins longs à
établir, des soins plus ou moins longs à prodiguer. Tant de diversité :
difficile à gérer. Voici une intéressante étude sur le sujet :
Mais peut-être y aurait-il une solution plus satisfaisante
que le système actuel toujours en tension et instable, qui pourrait bien un
jour tuer la sécu (si Macron ne le fait pas avant) : que les médecins
deviennent des fonctionnaires. Leur niveau de vie assuré, ils exerceraient avec
sérénité et sincérité ; finis les risques de complaisance, de clientélisme,
de fraude, de laxisme : demeureraient comme seules motivations la conscience
professionnelle et la déontologie. Bien sûr, des glandeurs, il y en aura toujours.
Mais avec un inspecteur sur le râble, ça ne poserait pas de problème - non ?
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