Le Grand Débat (j’écrirai GD par la suite) est en effet un
piège parce qu’il présuppose la confiance en ceux qui l’organisent,
alors que ceux qui l’organisent (le président, le gouvernement, les députés
LREM), sont de parti pris, partie
prenante - il y a donc conflit d’intérêt, donc aucune garantie de neutralité, et
au contraire une forte suspicion de partialité.
Concernant la participation ou non à ce grand débat (grande consultation
informelle dont les règles ne sont pas définies), j’ai bien écouté le président,
j’ai bien écouté les oppositions, j’ai bien écouté les orateurs de la France Insoumise,
mouvement dont je fais partie, et j’ai bien écouté les gilets jaunes qui sont
sur le rond-point de Kanfen (57).
Après quoi mon opinion est faite. Voici le dilemme :
1 - Refuser de participer au Grand Débat fournirait au
gouvernement cet argument que les gilets jaunes (et autres opposants) ne sont
pas des démocrates, qu’ils sont juste animés par la haine, ou je ne sais quoi
de plus vil encore… et que M. le président est donc autorisé à faire n’importe
quoi jusqu’à la fin de son mandat.
2 - Participer au GD en l’état aiderait M., le gouvernement et LREM à justifier leur politique, dont ils ont déjà fait savoir qu’ils n’en changeraient
pas, quel que soit le résultat du GD, puisqu’à la fin personne ne saura quels
étaient les résultats du GD, et que le président M. décidera a priori tout seul de ce
qu’il retiendra de choses à améliorer, comme par exemple, la diminution des
retraites.
La question fondamentale dans cette affaire de GD n’est pas
le GD en soi, mais la question de la confiance, qui s’exprime en ces
trois interrogations :
1 - comment serons-nous sûrs que tout ce qui aura été dit
sera « remonté » jusqu’à M.
(le président de la république) ?
2 - comment serons-nous sûrs que M. appliquera ce qui a été
dit majoritairement lors de ce GD ?
3 - comment serons-nous sûrs que les organisateurs du GD (députés
LREM, maires sans étiquette) remonteront honnêtement toutes les contributions
au GD ?
Si je pose ces trois questions, ce n’est pas que je
soupçonne M., son gouvernement, ses député LREM et les maires sans étiquette de
vouloir fausser, confisquer le GD au profit du statu quo (ce serait les accuser de malhonnêteté). Non, c’est juste
parce que je pense qu’en démocratie la confiance que j’accorde à mon élu ne le dispense
absolument pas de rendre des comptes et de se soumettre à quelque bienveillante instance de
contrôle. Il ne devrait donc pas s’en offusquer… à moins qu'il ait par avance des choses à
cacher.
Alors, puisque M., le gouvernement et LREM organisent ce GD
dans un grand flou artistique, je me suis dit que les vrais démocrates, qui ne
manquent pas dans ce pays, pourraient bien être d’accord avec la proposition suivante de mettre un peu d’ordre
et de contrôle démocratique dans cette affaire :
1. pas de contribution anonyme (chacune doit être signée et
indiquer le nom et l’adresse)
2. pas de collecte de contributions, à quelque niveau que ce
soit, sans contrôle des gilets jaunes (qui, même sans chef, sont capables de
nommer des représentants pour une tâche précise et un temps déterminé), sans
contrôle de citoyens tirés au sort et, pourquoi pas, sans contrôle de tous les partis
politiques ; il faut donc une telle commission de contrôle dans chaque
commune où est organisée une collecte de contributions au GD.
3. le dépouillement des contributions doit être fait sur
chaque point de collecte par cette commission. Le décompte numérique de chaque
idée, de chaque proposition, doit être établi scrupuleusement ; ainsi se dégagera
une hiérarchie, une priorité des questions à traiter : augmentation du
SMIC, ISF, RIC…
4. au niveau national, une commission de contrôle du
dépouillement doit être créée sur le même modèle (disons paritaire et aléatoire, pour faire court). Pas question de laisser M.,
son gouvernement et ses LREM mettre seuls leur nez là-dedans.
5. les résultats de tous ces échelons de dépouillement doivent à chaque stade être publiés immédiatement dans la presse, les médias nationaux et dans les
bulletins municipaux, s’ils existent.
Tous les médias (quels qu’ils soient) doivent suivre du
début à la fin tout le processus en donnant la parole à chaque commission de
contrôle et à chaque stade de remontée des résultats.
Si cela n’est pas fait, rien ne garantira que le GD ne sera
pas de l’enfumage. En revanche, si tout est enregistré, connu, à chaque étape
du processus et si, malgré ça, M., le gouvernement et LREM n’appliquent pas ce qui est
demandé majoritairement, ils auront fait la démonstration éclatante de leur
fausseté.
Ils n’auront alors plus beaucoup d’alternatives : ou s’en aller d’eux-mêmes
ou continuer de taper sur les gilets jaunes à coups de flashballs, parce que les gilets jaunes, c’est sûr, jamais ils ne lâcheront l’affaire.
- Et si les résultats étaient contraires aux gilets jaunes ?
- Dans les conditions que je viens d’énumérer, il n’y a
aucune chance !
Je vais donc participer au GD, mais ma première
revendication sera que M., le gouvernement, LREM et les maires sans étiquette acceptent que, de la collecte au dépouillement des contributions, tout soit sous le contrôle de commissions (gilet jaune, paritaires et aléatoire, comme j'ai dit). .
- Et si une majorité de gens mettent cette exigence en N°1 des revendications, que croyez-vous qu'il se produira?
- Je suis pessimiste : M; ne l'entendra pas et il enverra de nouveau les CRS.
- M'enfin, laissez-lui une chance !
Très bonne idée dans la droite ligne d'Etienne Chouard et qui nécessite une forte mobilisation. C'est LA chance pour que les revendications des GJ aboutissent ailleurs que dans une poubelle.
RépondreSupprimer