lundi 26 février 2018

La farce de l’info 4. - Le verbe l'emporte sur l’image

On nous avait dit que nous étions dans une « civilisation de l’image ». On se trompait, nous sommes dans une civilisation du verbe - du verbiage aussi, à l’occasion.

Pierre Bourdieu : « Les journalistes ont des lunettes… ils voient certaines choses et pas d’autres… ils voient d’une certaine manière les choses qu’ils voient… ils opèrent une sélection et une construction de ce qu’ils sélectionnent. »

Exemple : la banlieue. Depuis que les médias nous informent de ce qui se passe en banlieue, nous avons malgré nous adopté leur façon de n’y voir que des chômeurs, des « cas soc’s », des voyous, des dealers, des bandes armées, des émeutiers, des caillasseurs de pompiers, des incendiaires de voitures, une zone de non-droit. Partant de là, j'en connais, des haineux, qui n'auraient pas été mécontents que Sarko y envoie le nettoyeur Kärcher (l'armée avec des mitrailleuses et tout et tout)

Autre exemple : la guerre. Chaque conflit nous est présenté, non pas de façon neutre, avec tous ses tenants et aboutissants, en faisant appel à notre intelligence, notre capacité à en comprendre les enjeux, mais au contraire de façon délibérément partiale et manichéenne, en nous récitant le catalogue des horreurs commises par les méchants (antiaméricains) tandis que toutes les horreurs commises par des bons (proaméricains) seront soit immédiatement excusées, soit passées sous silence. Nous sommes ainsi constamment sous influence.

Pierre Bourdieu : « Le principe de sélection, c’est la recherche du sensationnel, du spectaculaire. La télévision appelle à la dramatisation, au double sens : elle met en scène un événement et en exagère l’importance, la gravité… »
C’est comme ça qu’il est devenu normal pour les journalistes de télévision de

- sortir une petite phrase de son contexte pour la faire paraître scandaleuse, quand ils veulent discréditer une personne: https://www.youtube.com/watch?v=3ddtNPHmyqI

- couper au montage les images qui n’illustrent pas le point de vue dramatique qu’ils ont choisi

- négliger certains événements et en favoriser d’autres. Voyez par exemple ici https://www.tf1.fr/tf1/jt-13h/videos les vidéos du journal de 13h sur TF1, ce 26 février. Non, ce n’est pas une caricature, c'est la réalité. 

Pierre Bourdieu : « En fait, paradoxalement, le monde de l’image est dominé par les mots. La photo n’est rien sans la légende qui dit ce qu’il faut y comprendre. Nommer, c’est faire voir, c’est créer… Les mots peuvent faire des ravages : ils créent des fantasmes, des peurs, des phobies, des représentations fausses »

- Ainsi, peut-on parler de foulard islamique, à moins qu’il soit aussi islamiste, alors qu’il ne s’agit que d’un fichu que portent certaines femmes musulmanes, comme certaines bonnes sœurs une cornette.

- Ainsi Macron modernise-t-il la société en détruisant ce qui dans le code du travail protégeait les travailleurs ou en rendant plus difficiles, voire impossibles, les plus vitales des missions de services publics, telles que la santé, la justice, l’instruction…

- Suffit-il de dire que des bombardements sont des « frappes chirurgicales » pour que la guerre devienne propre, ne tuant soi-disant que des professionnels ?

- Les journalistes connaissent bien la puissance des mots quand, pour l'abattre, ils essaient de faire dire à toute force à un interviewé quelque chose, n'importe quoi qui, par de pernicieux syllogismes et sous-entendus, le fera passer pour antisémite, arme plus létale qu'une accusation de viol (comme le fait cette journaliste dans cette vidéo https://www.youtube.com/watch?v=VChhgUeBScg)

Pour finir, voici comment est traité le joli mot de démocratie. Oh que oui, la parole est importante ! tellement importante que depuis que nous avons en 2005 voté contre la constitution européenne telle qu’elle nous était proposée, il n’est aucun gouvernement français qui ne nous ait répété, à chaque fois que nous rechignions à courber l'échine, que nous ne comprenions pas bien, que peut-être aussi il nous avait mal expliqué... C'est donc parce que nous sommes trop cons qu'on nous a quand même imposé l'Europe libérale de Juncker et Merkel. 
Macron, lui, a dépassé ce stade un peu embarrassant pour un monarque qui se veut absolu, car il a une méthode  : les ordonnances.
1. il n’explique pas, il dit juste en gros ce qu’il va faire. 
2. il invite les partenaires sociaux à négocier. 
3. il se fiche du résultat des négociations (et il le dit) et impose directement ce qu’il a promis au départ, sans même passer par la représentation nationale qui est priée de voter la loi avant de savoir ce qu’il y aura dedans.


Les députés LRM sont vraiment des guignols. Qui c’est qui a dit ça, déjà ? Wauquiez, non ?

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire