mercredi 4 octobre 2017

A chaud : « Comme j’aime », archétype du produit de l’économie capitaliste.

Chère Sylvette,

Tu n’as pas pu échapper à cette pub qui depuis des mois et des mois passe chaque midi, chaque soir, plusieurs fois sur France 3, à l’heure où tu écoutes distraitement les infos : « Comme j’aime », ça s’appelle et ça te vend des repas livrés à domicile censés te faire maigrir de 5 ou 6 kilos pas mois. Et tu as donc essayé. Alors ?

« Oui, 54.90€, soit 9,15€ par jour, c’est la formule minimale, pour tous les repas, 6 jours par semaine, pendant un mois. Pour la promo ’’semaine gratuite’’, il a donc fallu que j’achète le mois. Alors, pour ça j’ai eu, par exemple : 2 pancakes au petit déj’, poulet, légumes plus un dessert de fruit à midi, 4 petits sablés, pavé de saumon (on ne sait pas d’où il vient) et légumes le soir. Rien d’autre. Vu les quantités, forcément j’ai maigri. Et j’ai eu faim. En plus, c’est livré seulement une fois par mois (pour réduire les frais de transport, évidemment). Donc, c’est sous vide et plein de conservateurs. Pas un seul jour, je n’ai mangé frais. En plus, ce n’est pas bon. Et vu le prix, comme c’est fabriqué à la chaîne automatisée, tu te doutes du sacré bénef qu’ils se ramassent. Je suis dégoûtée. Ah oui, le site propose aussi un suivi par une diététicienne… »

Parce que c’est diététique, ça ? Allez, c’est bien l’arnaque que je soupçonnais dès le premier spot. Parce que maigrir d’autant en si peu de temps, tous les diététiciens te diront que tu craqueras forcément et que tu en reprendras alors le double (de kilos). Mais qu’importe, la pub est faite exclusivement pour les gogos. « Mentir », par omission, par sous-entendu, par suggestion, est le premier devoir du publiciste.

Comme cette campagne est interminable et de plus en plus pressante, tu te dis peut-être comme moi, chère Sylvette, qu’effectivement ça doit marcher fort et qu’il y a donc encore pas mal de gogos comme toi à plumer. Ou bien tu fais la supposition inverse : ça ne marche pas fort, mais maintenant qu’ils ont commencé, les propriétaires de l’affaire sont condamnés à aller jusqu’au bout en espérant rentrer dans leurs sous. C’est peut-être pour ça qu’ils offrent maintenant une semaine ’’gratuite’’.
« Oui ben, en tout cas, ils ne m’auront plus. Maintenant, je fais mes courses, c’est meilleur, c’est frais et ça me coûte moins cher. »

Moi, je me dis qu’à eux ça doit coûter drôlement cher, cette campagne de pub, parce qu’en plus le clip est plutôt long. Ou alors ils ont des prix sur le service public, par copinage, ou ils ont des actions dans l’agence de pub ou ils ont une cagnotte inépuisable et comme des jetons dans un bandit manchot, ils mettent le pognon dans la pub en attendant le jackpot.

La pub, tu vois, c’est beaucoup d’argent foutu en l’air qui aurait pu mieux servir ; à augmenter les plus bas salaires, par exemple. Mais non, ceux-là, les bas salaires, doivent rester bas pour qu’on puisse produire à bon marché des choses à vendre très cher aux plus hauts salaires.

Et tu sais d’où il vient tout ce fric qui a servi à créer « Comme j’aime » ? Est-ce que ce serait une de ces géniales start-up, créée par des jeunes sans un sous mais pleins de dynamisme ? Je rigole. En fait, ça n’est pas compliqué à deviner :
c’est du surplus de dividendes d’autres activités.
Ces mecs sont tellement riches et se prennent tellement de bénéfices, qu’ils ne savent pas quoi faire de leur argent. Alors ils inventent un soi-disant nouveau produit, copié en l’occurrence sur le portage de repas à domicile, mais en dégueulasse, et se disent que 
puisque ça existe, il va y avoir des gogos pour l’acheter.

Les gogos, ce sont dans ce cas précis les gens qui souffrent de surpoids et qui cherchent désespérément la solution miracle, les gens qui ont la flemme de se faire cuire un œuf, ceux qui n’en ont pas le temps, les snobs, ceux qui ont les moyens. Pas les pauvres, c’est sûr.
Au lieu de consacrer leur fric à faire du bien à tout le monde, ces investisseurs-là visent simplement à faire encore plus d’argent sur le dos des gogos. Et où les gogos se trouvent-ils en plus grand nombre ? Dans la classe moyenne.
C’est pourquoi la classe moyenne est la cible privilégiée de la pub : ces gens-là ont des sous, il faut les leur soutirer dare-dare, quitte à leur vendre de la merde et des produits inutiles du genre « Comme j’aime ». Et comme beaucoup sont gogos et fiers de l’être, ça marche.

Voilà comment le fric va toujours aux mêmes, parce que des milliards sont dépensés en pub et en futilités. Et pendant ce temps, des familles vivent pauvrement de la charité.
Avec Macron, ça va encore empirer. « Comme j’aime » a du souci à se faire.


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