J’y étais.
J’ai vu beaucoup de monde, 160.000, beaucoup de belles affiches, d'animations originales - musique, danse, théâtre… J’ai rencontré
des gens, nous avons pique-niqué, causé, rigolé, chanté, c’était sans façons, familial, détendu,
parfois joyeux. On avait envie d’y croire. J’étais à deux doigts d’y croire.
Croire à quoi ? Qu’on allait être assez forts...
J’ai vu beaucoup de cars de CRS, de cars de gendarmerie, des
grilles en fer qui barraient les rues adjacentes au parcours, et des représentants des forces de l’ordre,
alignés, caparaçonnés, armés, qui arboraient des tronches à pas rigoler - vraiment
impressionnant ! On se demande à quoi ils pensent, s’ils sont sélectionnés
pour leurs opinions politiques…
J’ai pas vu de black blockers. Ou peut-être ces deux jeunes
avec un mégaphone qui, place de l’Opéra, recrutaient « des hommes
( ?) capables de se mettre à l’avant du cortège », comme s’il
s’agissait d’un jeu. J’ai vu des poussettes, des enfants, des grands-mères, des handicapés.
J’ai pas vu Macron, sauf en photo ou en marionnette. Le vrai
sans doute était en voyage quelque part, loin, en allé là-bas pour n’y rien
dire, ni rien faire d’important, comme d’habitude, à part se mettre en scène et
faire parler de lui. Son absence le jour de sa fête est peut-être après tout un
hasard, vu qu’il est en voyage un jour sur deux depuis qu’il est élu.
« Hé ! C’est pas lui qui paie, il aurait bien tort
de pas en profiter » reconnaissent les crevards.
J’ai appris le jour même, par la propagande BFM, RTL, France
Télévision et autres médias soumis, que ça s’était plutôt bien passé -
seulement neuf arrestations -, qu’un
véhicule de Radio France avait été pris pour cible et qu’un gendarme avait été
blessé - sans autre détail. Rien sur les manifestants. J’ai entendu dire en revanche que les Insoumis, avec cette
fête à Macron, poussent à la haine. J’ai entendu partout les LREM en grand nombre, invités en
qualité de pare-feu, rappeler que ça n’est pas 40.000 manifestants qui vont
changer les choses, que Macron a été élu - point - et qu’il appliquera son
programme et, pour preuve que c'est bien, les micro-trottoir d’un tas de gens qui se disaient
contents de Macron.
Et pour finir, j’ai entendu qu’Edouard Philippe rencontrerait
les syndicats mais qu’il avait déjà annoncé qu’il n’y aurait rien à négocier.
Et puis, une fois rentré, j’ai eu l’occasion de discuter
avec trois connaissances qui avaient vaguement hésité (ou fait semblant)
pendant la campagne présidentielle et j’ai constaté qu’elles n’hésitent plus
mais sont convaincues au contraire qu’il est urgent de lui laisser sa chance, à
Macron. Sa chance de quoi ?
Vous avez beau exister, vous n’existez pas quand vous n’êtes
pas vu à la télé et, pour une majorité de gens, vous n’existez que comme
repoussoir quand la télé systématiquement vous démolit. (Puisque Patrick Cohen le dit, ça doit être vrai.) La propagande continue en
effet de manipuler les esprits, avec répétition à l’envi de mots creux comme
réorganisation, modernisation, réforme… qui cachent la réalité et la violence de l’attaque
contre les travailleurs, avec répétition à l’envi du credo libéral - donner aux
riches afin qu’il tombe des miettes pour les travailleurs -, avec répétition à
l’envi des vertus présidentielles et crachats sans vergogne sur l’action des
opposants.
S’il y avait de la colère dans le pays, on aurait été plus
nombreux, samedi, et les autres jours de manif.
Non, ce qui domine dans le pays, c’est l’indifférence aux difficultés des autres, la résignation - « De toute façon, il fera ce qu’il voudra »
-, le manque de courage et la mésestime de soi.
Va falloir remettre le couvert. Rendez-vous les 7, 15, 22 mai, pour soutenir les luttes en cours, et le 26 pour continuer la fête à Macron.




Un autre point de vue: http://taranis.news/2018/05/paris-5-5-2018-manifestation-lafeteamacron-de-la-france-insoumise/
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