jeudi 29 juin 2017

La comédie du pouvoir - 4. Comment se crée de l’adhésion (lavage de cerveau).

D’abord, on balance dans les médias deux ou trois « couacs » - c’est le pauvre mot employé - survenus cette année lors de l’épreuve du baccalauréat : copies volées, sujets piratés ou perdus ; bien la preuve que ça ne marche pas bien, le bac ! (même si tout le monde sait que ces couacs ne représentent qu’un phénomène très marginal)

Le lendemain, en titre, au journal du matin, un chroniqueur (évidemment expert) pose la question : « Faut-il supprimer le bac ? » (toujours exagérer pour attirer l’attention !) Tiens, justement, le ministre Machinchose planche là-dessus, promesse de campagne de Macron. (La vache ! Il fait ce qu’il dit, le gars.)

Et l’expert commence à vous faire l’article sur ce bac tellement décrié (sic, sans préciser par qui, mais tout le monde sait bien que c’est uniquement dans le scénario médiatique) à cause de ces dysfonctionnements (couacs en langage médiatique populaire) dont on vous parlait la veille, mais pas seulement, car :
- l’organisation du bac coûte très, très cher en salaires de profs
- le bac n’est pas du tout un laisser-passer pour l’université puisque une grande partie de ceux qui le décrochent ne vont pas à l’université ( ??? - raisonnement hallucinant, incompréhensible, qui permet tout de même de suggérer que la suppression du bac pourrait permettre à ceux qui ne l'auraient pas eu, eux, d’accéder à l’université avec plaisir et reconnaissance - enfin, je suppose que c'est l'intention)

Là, vous doutez, forcément : supprimer le bac pour ne rien mettre à la place ? Et hop, tous à l’univ’ ! Meuh non, voyons. Sans déjanter, comme s’il n’avait pas posé une question en préambule, le type déballe enfin le pot aux roses : il s’agit de mo-der-ni-ser, avec contrôles continus pendant deux ans (notez que le contrôle continu existe déjà, puisque les profs font des interros surprise et mettent des notes, mais il ne compte pas pour l’obtention du bac, seulement pour le passage ou non d’une classe à l’autre) suivis d’un examen du bac comprenant seulement quatre matières fondamentales.

(Ah, bon ? Alors, rien ne change, faudra toujours le bac pour aller en fac ? On allège seulement pour faire des économies, quoi. Tsst, tsst ! Méfiance : avec Macron, on a l’habitude qu’une réforme en couve toujours une autre, qui sera soigneusement cachée aux Français par l’entremise des grands médias populaires dont il ne faudrait pas croire qu’ils sont les médias du peuple.)

Mais la chronique se termine. Rassurez-vous, ça n’est pas pour tout de suite, le ministre va d’abord consulter. D’ailleurs, il a déjà commencé. Et vous voilà rassuré. (Ah oui, consulter… Mais qui, et sur quoi exactement ? Sais pas. Mais bon, on a le temps de voir... venir) Au passage, vous êtes gentiment prévenu, un peu à la rigolade, contre les profs : « Les matheux, ça ira, ils sont qualifiés d’office, mais bonjour pour convaincre le prof d’histoire de n’avoir plus à corriger ses traditionnelles copies du bac. » (et là, il vous vient à l’esprit le flot des critiques que vous avez depuis des lustres entendues à propos de ces gens-là qui, contrairement à vous, ont la sécurité de l’emploi, sont bien payés, ne fichent rien, sont toujours absents et traînent des pieds, rechignant à la modernisation, c’est bien connu… ) Et ça vous fait peut-être effectivement rigoler... Vous êtes déjà en train de mûrir votre adhésion à la réforme du bac.

Moi ce que je constate, c’est qu’à force qu’on cogne dessus comme ça, le prof est devenu un ennemi personnel pour pas mal de Français. Ca n’arrange évidemment pas la relation avec les familles et ça n’encourage pas les gosses à bosser. Et vous, qu’est-ce que vous en pensez ? Bon, n’insistons pas. Continuons.

Comme dit ci-avant, je soupçonne une entourloupe derrière cette réforme du bac, précisément le contraire de ce qui est laissé à entendre ; par exemple, une sélection encore plus sévère à l’entrée en fac (donc une pilule à faire avaler).
C’est vrai, quoi, tous ces étudiants qui astiquent les bancs de l’amphi pendant deux ou trois ans pour finalement devenir coursiers à vélo ou vendeurs de chouros sur la plage, même autoentrepreneurs, c’est pas rentable. En même temps, une ribambelle de ministres de l’Education Nationale qui, depuis cinquante ans, n’ont eu de cesse de démolir (moderniser) le système scolaire républicain et démocratique, c’est bien pire que moins rentable - non ? Et ça n’est pas Machinchose, shooté à la macronite, qui va déroger à la tradition de nocivité maximale des ministres de l’Educ’ Nat’. Je prends le pari.

En résumé : attendez-vous à pire que ce qui existe, et si on vous jure blanc, traduisez noir. La preuve ? Hé ! Pourquoi pensez-vous que toutes les chaînes radio et télé ont traité ce sujet en même temps et sur le même mode ? Elles ont reçu des ordres, tiens. De qui ?
Sais pas.

On se retrouve dans quelques jours ou semaines pour un nouveau sketch de propagande gouvernementale.


Richard

mercredi 28 juin 2017

La comédie du pouvoir - 3. La Nouvelle Gauche

Olivier Faure, que je ne connaissais pas, le nouveau président de ce qui reste de l'ancien groupe PS à l’Assemblée Nationale, lors d’une conférence de presse, a péniblement expliqué que le Parti Socialiste allait disparaître. Enfin, moi, c'est ça que j’ai compris.

Mais attention, prévient-il d'une voix morne : « Nous sommes socialistes, nous sommes écologistes, nous sommes démocrates, nous sommes républicains, nous sommes progressistes. » 
A part socialiste (j’entends socialiste comme Cuba du temps de Fidel), quel politicien, quelle politicienne de nos jours n’est pas tout cela « en même temps », hein ? Et pour cause : ça n’engage à rien, puisque ça ne veut rien dire. 
En effet : des écologistes, il y en a de toutes les nuances, la plupart ayant beaucoup déteint depuis René Dumont ; être démocrate, c'est dégainer le 49-3 contre le résultat d'un référendum ; être républicain, c'est en gros accepter d'être français - pas trop dur ; progressiste, c'est le terme que la gauche en général s'était approprié pour se dire protectrice des petites gens, mais il y a eu comme un glissement de sens, et aujourd'hui ça serait assez proche du modernisme de la droite : progresser, moderniser, même sous-entendu confus que ce serait forcément mieux pour nous - mais en fait, c'est le contraire. 
Tous ces mots-là sont comme les drapeaux, on se range derrière et on va au casse-pipe sans se demander pourquoi ; c'est juste pour le drapeau. Je ferme la parenthèse... que je n'avais pas ouverte, c'est vrai.

Le Faure, que je ne trouve pas fort convaincu de son propre discours, nous assure que c’est simplement pour simplifier la tâche des journalistes (quelle délicatesse !) que les ex-socialos vont désormais se faire appeler « La nouvelle gauche ». Eh ben, mon colon, quelle ambition !

« Car nous croyons au clivage gauche droite ; et nous sommes à gauche … » 
OK, à gauche de quoi ? A gauche de LR ou à gauche de LREM ? Sais pas. Et à partir de là, le pauvre va nous ouvrir, mettre à nu, le fond confus de sa pensée, incapable de finir sa phrase : « ...mais en même temps, nous croyons à la nécessité de [cafouillis ] de se refonder, d’où le mot nouvelle accolé à... » 
Il aurait pu dire "nous allons nous refonder", mais non, il croit seulement que c'est nécessaire. Même pas un soupçon de volonté ! Du coup, c'est un simple mot qui va refonder le parti ? Ben oui, suffit de coller "nouveau" sur un vieux nom et le tour est joué. Il nous prend pour des cons, c'est évident. 

Et ça finit en charabia : « …qui définira… j’allais dire en marchant [… ] non, plutôt en courant… »
Et tac ! Vrai ou faux lapsus, l’aveu est à présent publiquement fait que la « nouvelle gauche » est en réalité délibérément destinée à finir à la cour du fameux révolutionnaire de gauche, l'incomparable commediante, Emmanuel Macron. (*) 

La vidéo s’arrête là. Peut-être est-ce fait exprès. Mais ça n’a aucune importance ! Tout est dit : ce court épisode médiatique montre que les mots en politique ont été sciemment vidés de leur sens pour nous tromper. A tel point qu’il faut souvent comprendre le contraire de ce que normalement ils signifient. Au théâtre, le malentendu fait rire. Mais là...  

Bon, si vous faites la chasse aux mots trompeurs, envoyez-moi vos prises.

Richard

(*) Eh oui, suffisait de coller "révolution " sur un vieux programme libéral. Bien joué, Macron ! 

La vidéo avec Olivier Faure, c'est ici :

mardi 27 juin 2017

La comédie du pouvoir - 2. Oliver Stone et Poutine

Encore une fois, j’hallucine, dites donc : le film « Conversations avec monsieur Poutine », d’Oliver Stone, passe à la télé, sur la chaîne nationale numéro 3, un film au titre déjà subversif, si l’on en croit tout le mal qui a été dit de Poutine durant la récente campagne électorale française. Connaissant nos lèche-bottes de journalistes, je subodore la grosse manipulation. Et en effet, l'émission s'intitule "Faut-il croire Wladimir Poutine?" Premier sous-entendu : non, bien sûr. Bon, je m’installe quand même devant le poste. J’aime bien Oliver Stone et je suis curieux de savoir comment il a fait son Poutine.

Stone pose des questions et laisse parler le président russe qui raconte un peu sa vie, revient sur l’histoire de l’écroulement de l’URSS, explique sa stratégie et ses objectifs et exprime son avis sur les agissements de ses « partenaires » américains et européens. En deux ou trois occasions, Stone donne l’occasion à Poutine de dire sa version de faits qui ont été présentés autrement « en occident ». Le personnage paraît tout à fait normal. Genre Mitterrand, vous voyez ? Je devine le projet de Stone - comme vous-mêmes, n’est-ce pas ? - qui est de donner un droit de réponse à celui qui est par ailleurs décrit comme le diable, et parfois comparé à Hitler, et j’y adhère. Qui en effet n'entend qu'un son de cloche... devient sourd.

Et ça, ça doit gêner les journalistes de notre télé gouvernementale, parce qu’à peine le film terminé, ils passent à l’attaque :
Francis Letellier : « Est-ce qu’il n’a pas cherché à vous impressionner ? »
Sylvie Kauffmann : « Ses yeux veulent vous en imposer. »
Bernard Guetta : « Ne pas interrompre Poutine est un parti pris dangereux, car les gens pourraient ne pas comprendre. »
SK : « Et en plus, il n’y a pas de « follow » (de question à la suite)… »
FL : « N’avez-vous pas le sentiment d’avoir été manipulé ? »

Oliver Stone ne se défend pas. A mon avis, il sait dans quel théâtre il a été appelé à figurer. Il n’a même pas été présenté. Qu’il a eu des Oscar, oui, on l’a dit, mais qu’il est pour les Américains un gênant poil à gratter, un dangereux gauchiste qui dénonce toutes les perversions et dérives de la société des Etats-Unis, on ne le dit pas. On le fait passer au contraire pour un gros naïf. Moi, je pense qu’il est bien content que son film soit vu. Point. Pour le reste, il ne va pas se disputer avec des minables comme ces journalistes-là.

Parce que eux, les Letellier, Kauffmann, Guetta et autres Cohen, ils se prennent pour des experts, ils savent que Poutine est un dictateur, que Poutine menace d’attaquer bientôt les USA et l’Europe, que Poutine est un menteur, etcetera. Et leur déontologie professionnelle leur commande d’en avertir le public français qui est trop con pour se faire une idée par ailleurs. Et ils n’ont de cesse de parvenir à le répéter le plus grand nombre de fois possible dans le cours d’une émission. Ceci explique pourquoi certaines interviews durent des plombes autour des sujets les plus mesquins et insipides. 

En réalité, ils ne font pas un travail de journaliste, ce sont des faiseurs d’opinion, des publicitaires, des serviteurs de leurs patrons, tant politiques que du secteur économique, thuriféraires de l’idéologie totalitaire du capitalisme ultralibéral. Le travail de ces journaleux est de discréditer toute personne et tout discours qui ne seraient pas d’accord avec cette idéologie.
C’est donc parce qu’elle est journaliste que Natacha Polony a été virée de partout.

Ainsi le passage du film d’Oliver Stone est-il encore un moyen de donner à voir combien nos medias sont libres, puisqu’ils montrent le film qui va à l’encontre des idées qu’ils propagent à longueur de temps. Mon dieu que c’est habile !
Ca me rappelle comme j’ai halluciné quand j’ai vu la tête de Besancenot chez Drücker, avant les élections présidentielles de 2007. Là aussi, manipulation : Besancenot avait bien parlé, dit des choses vraies que le PS n’osait plus dire, et il était monté dans les sondages, volant une partie de l’électorat PS. Bien vu, Sarkozy.

Ah oui, une chose que Letellier, s’il était journaliste, c'est-à-dire honnête, aurait dû dire aux téléspectateurs, c’est qu’Oliver Stone, avec Danny Glover et Noam Chomsky, a signé en avril 2017 une pétition de soutien à Jean-Luc Mélenchon.


Richard

lundi 26 juin 2017

La comédie du pouvoir - 1. Néonicotinoïdes

Ce midi, à table - parce qu'on ne parle pas la bouche pleine - on regardait les infos, sur France 3.
Et là, d'un coup tu hallucines (mais comme d'habitude).

Dans le même journal, en moins de cinq minutes, on apprend :

1.qu'il y aurait un litige entre Trucmuche, le ministre de l'agriculture, et Nicolas Hulot, ministre de l'écologie, à propos des néonicotinoïdes, appelés aussi les tueurs d'abeilles. Allons bon, un couac dans le gouvernement ? Pas possible !

2. que Trucmuche veut, au nom de la survie des "paysans", une dérogation à l'interdiction de ces pesticides, et que naturellement l'Ecolo Héliporté ne reviendra pas sur leur interdiction.
Puis un petit passage vivant : on interview le premier dans un studio face à un micro, le second marchant dans une allée avec quelques compagnons, décontracté, les mains dans les poches. Ils disent la même chose que la présentatrice, au cas où on n'aurait pas bien compris. Enfin, pour être honnête, Trucmuche propose une sorte de moratoire jusqu'à ce qu'on ait trouvé une autre molécule...

3. Retour immédiat à la présentatrice, papier en main : "Dernière minute : nous apprenons de source officielle (et vague) que l'interdiction de ces pesticides dangereux pour la santé, qui est prévue pour 2020, ne sera pas remise en cause." Comme si elle venait juste de recevoir un coup de fil de l'Elysée.

Et hop, on passe à autre chose.

Ah, la jolie mise en scène ! Malheureusement, les ficelles sont un peu grosses. Il eut été en effet plus habile et plus respectueux de l'intelligence du téléspectateur de ménager un temps de suspense entre la mise en place du drame et son dénouement. Quelques minutes peut-être ?

Le message était évidemment : voyez comme le pluralisme des idées est assumé au sein du gouvernement, et comme Hulot (et le souci de la santé des Français) est tout de même plus fort que le lobby du pesticide, voyez comme l'écologie compte pour vos nouveaux dirigeants !

J'en déduis que si la télé nationale, toute dévouée à notre bon président EM, se fend d'une telle pub pour Nicolas Hulot, c'est qu'il y a :
1. désormais plus d'électeurs écolos que paysans en France
2. anguille sous roche ; c'est-à-dire que d'ici 2020, de l'eau néonicotinoïdisée aura coulé sous les ponts et Hulot aura avalé son chapeau ou quitté le gouvernement en faisant un peu semblant d'être fâché.


Si vous avez une meilleure explication pour ce non événement, écrivez-moi.

Richard